Barrages vivants, enherbement, reboisement, une protection indirecte
Depuis les années 1860, des services de l’État travaillent à sécuriser les habitats naturels et humains menacés par l’érosion et les torrents en montagne. Des techniques de génie biologique sont mises en œuvre afin de de stabiliser les berges et de diminuer la pente des torrents.
Les barrages vivants
Ce sont les clayonnages et le fascinage. Ils peuvent être utilisés pour stabiliser le lit du torrent, pour stabiliser les berges, en limiter l’affouillement (c’est à dire le creusement), diminuer la pente par la formation de petits atterrissements en amont.
Les clayonnages sont constitués généralement de branches de saules entrelacées et tressées sur des piquets profondément enfoncés dans le lit afin de former de petites parois.
Les fascinages sont constitués de fascines de saule (fagots) superposées et fixées par des piquets ou pieux pour les plus grandes d’entre elles. Les fascines peuvent être disposées en travers des ravines mais elles sont aussi communément utilisées le long des berges pour prévenir les divagations des cours d’eau.
Les branches de saules se bouturent, en prenant racine et créent une barrière vivante dans le lit ou sur les berges.
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Le garnissage (ou façonnage de lit) consiste à positionner des branches d’arbres dans le lit du torrent, tournées vers l’amont pour piéger les sédiments. La base des branches est tenue par des piquets, des clayonnages et des traverses encastrés dans le sol. Une fois que les branches sont recouvertes de matériaux, on peut ajouter une autre couche de branches et arriver petit à petit à un comblement du ravin. Ce milieu sera ensuite plus propre à accueillir de la végétation car plus stable, moins raide et potentiellement plus humide.
L'enherbement et le reboisement
L’enherbement vient limiter le ruissellement des eaux et retient les terres des terrains instables. Il peut être une première étape avant la mise en place d’arbres. Cet enherbement peut se faire par semis direct ou par installation de mottes.
Le reboisement est la plantation d’arbres sur les berges, les atterrissements et les versants latéraux, ayant pour but de retenir sable et rochers, de consolider les pentes, de limiter le ruissellement ainsi que parfois les mouvements de la neige. Le couvert forestier abrite les surfaces contre les aléas météorologiques. Il fournit de l’humus qui va fertiliser les sols, favoriser l’installation durable de la végétation et permettre un éventuel ralentissement du débit des eaux pluviales ou des neiges fondant à sa surface. Les services de reboisement privilégiaient la mise en place de futaies, c’est-à-dire de forêts composées de grands arbres, qui se régénèrent par semis.
Et aujourd'hui à INRAE
À Grenoble, au sein du Laboratoire LESSEM (Écosystèmes et sociétés en montagne), les équipes COMPET et BIOSES développent des méthodes d’ingénierie écologique, ou de génie végétal, pour une conciliation entre protection contre les risques naturels et écologie. Les résultats des recherches et travaux contribuent au développement de solutions fondées sur la nature.
Les solutions fondées sur la nature sont définies comme « les actions visant à protéger, gérer de manière durable et restaurer des écosystèmes naturels ou modifiés pour relever directement les défis de société de manière efficace et adaptative, tout en assurant le bien-être humain et en produisant des bénéfices pour la biodiversité » (Source : UICN, 2016).
Entre 2002 et 2015, le projet « Génie végétal dans le bassin versant de la Durance » a permis l’installation de 2 000 ouvrages composés de seuils en bois et surmontés de boutures et de plants. Ce sont des cordons et garnissages qui jouent le rôle de peignes végétaux et permettent de bien retenir les sédiments fins tout en revégétalisant des sols nus. Ces aménagements continuent de se développer.
Sources bibliographiques
Demontzey, P. (1882). Traité pratique du reboisement et du gazonnement des montagnes. Rothschild J. (ed.), 528 p.
Demontzey, P. (1882). Le reboisement des montagnes. La nature, n°496. p.151-155, p. 182-186, p.215-218, p.260-263.
Bénardeau, F., & Cuny, E. (1889). La science forestière illustrée. Ministère de l'agriculture service central, Fascicule 1, Partie 4.
Thiéry, E. (1891). Restauration des montagnes, correction des torrents, reboisement. Baudry (Paris), 413 p.
Bernard, C. (1927). Cours de restauration des montagnes. ENEF. 1er fascicule, texte et planches. (Document disponible hiver 2024-2025)
Bernard, C. (1927). Cours de restauration des montagnes. ENEF. 2e fascicule, planches. (Document disponible hiver 2024-2025)
Clave, A. (1969). Rapport VI.3. Le rôle de la restauration des terrains en montagne dans la protection contre les inondations, in La prévision des crues et la protection contre les inondations. Dixièmes journées de l'hydraulique, Paris, 5, 6 et 7 juin 1968. Tome 6,.
Labonne, S., Rey, F., Girel, J., Evette, A. (2007). Historique des techniques de génie biologique appliquées aux cours d’eau. Ingénieries eau-agriculture-territoires, 52, 37-48.
Bonin L, Evette A, Frossard P-A, Prunier P, Roman D, and Valé N. 2012. Génie végétal en rivière de montagne - connaissance et retour d’expériences sur l’utilisation d’espèces et de techniques végétales : végétalisation de berges et ouvrages bois. Europeen Union and Swiss Confederation. 321p. [online] disponible : http://www.genieecologique.fr/sites/default/files/documents/biblio/genialp_ouvrage_complet.pdf
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Leblois S, Evette A, Jaymond D, Piton G, Recking A. 2022. Processus et causes de défaillance du génie végétal pour la stabilisation des berges de rivière : retour d’expérience sur un large jeu de données issues de la BD GeniVeg. Géomorphologie : relief, processus, environnement 28 DOI: 10.4000/geomorphologie.16954
Didier M, Evette A, Schmitt E, Leblois S, Jaymond D, Evette J-B, Mira E, Raymond P, Frossard P-A, Vivier A. 2023. Les fascines de ligneux en génie végétal. Guide technique. Office français de la biodiversité – INRAE . https://www.researchgate.net/publication/371124569_Les_fascines_de_ligneux_en_genie_vegetal_Guide_technique
Texte rédigé par Pascale Hénaut (INRAE-DipSO).
Merci à Guillaume Piton (Univ. Grenoble Alpes, INRAE, IGE) pour sa relecture.
Pour citer ce texte : Focus Agate : Barrages vivants, enherbement, reboisement, une protection indirecte, Pascale Hénaut (INRAE-DipSO), novembre 2024. https://agate.inrae.fr/agate/fr/content/focus
Illustrations
Le bandeau a été réalisé à partir d'une photographie "04-1313 : embroussaillement de ravins, torrent du Riou-Bourdoux, Journée, 1909"
La vignette a été réalisée à partir d'une photographie "pépinière de reboisement avec rigoles d'irrigation, torrent de Sainte Marthe"