Mister Buckton et les pucerons anglais

Il est facile de réduire les pucerons à de petites bêtes qui tuent nos plantes d’intérieur ou nos rosiers. Pourtant certains ouvrages peuvent nous ouvrir d’autres horizons.

Entre 1876 et 1883, George Bowdler Buckton, chimiste et entomologiste sur le tard, publie ce qui sera pendant quelques décennies la référence sur les pucerons présents en Angleterre.
Autour de sa demeure dans le Surrey et grâce à des relations, il va collecter des dizaines de pucerons pour les étudier, les mesurer, les dessiner et même les peindre à l’aquarelle alors qu’ils sont encore vivants.

Sa méthode d’étude est la suivante : anesthésier le puceron, le positionner sur la lame avec du baume du Canada, étendre les pattes et les ailes et les dessiner grâce à camera lucida ou chambre claire. Ensuite il colore les dessins à l’aquarelle, y ajoute les ombres pour rendre les insectes aussi vivants que possible. Il effectue enfin des mesures (longueurs des pattes, des antennes et du cornicule (ou siphuncule) et scelle la lame.

Dans les quatre volumes de son ouvrage, 170 pucerons anglais sont ainsi peints et décrits avec les connaissances de son temps. Ce fut l’ouvrage de référence pendant quarante ans sur ce sujet.

fig.1 jeune spécimen, avec un rostre demesuré. fig 2 femelle aptère vivipare. fig 3 autre exemple, se nourrissant d'une tige du sureau. fig 4. femelle vivipare ailée. fig 5. Myrmica rubra, buvant le miellat sortant du cornicule d'une larve d'Aphis. Les longues antennes de la fourmi sont utilisées pour stimuler les côtés de l'Aphis, comme un signal apparemment.

Dans les années 1970, son travail est repris à partir de ses collections d’insectes, rachetées par le Natural History Museum de Londres après son décès et les planches originales réalisées pour l’ouvrage.
Des rectifications sont alors apportées à sa classification. Il avait identifié 54 espèces et 2 variétés. En 1973, des lectotypes (spécimen qui devient le type nomenclatural d’une espèce) ont pu être associés à 49 d’entre elles, ce qui valide en grande partie ce travail vieux de près d’un siècle.

Quand on n’est pas entomologiste, l’intérêt de l’ouvrage est surtout esthétique. Les aquarelles réalisées par Buckton révèlent également en couleur les différentes étapes de développement des pucerons, avec une grande finesse d’exécution.

Et aujourd'hui à INRAE ?

Aujourd’hui, c’est par la photographie couleur que les caractéristiques physiques des pucerons sont représentées.

« L’encyclop’Aphid, le site des Aphicionados » est une base de données développée par l’équipe Écologie et génétique des insectes (UMR IGEPP, INRAE, Agrocampus Ouest et Université de Rennes 1), basée à Rennes).

Base de données publique et ouverte à tous, elle donne accès à des clés d’identification, des fiches d’espèces, des vidéos et des articles pour le grand public autour du thème « pucerons et agriculture » et sur la recherche en aphidologie.

Représentation de P. Humuli, à gauche par M. Buckton, à droite, photos tirées de l'encyclop'Aphid.

Sources bibliographiques

  • Doncaster, J. P. (1973). G B Buckton’s work on Aphidoidea (Hemiptera). Bulletin of the British Museum (Natural History) (Entomology), 28, 25-109.
  • Loxdale, H. D. (2004). Who was... George Bowdler Buckton ? Biologist, 51, 41-42.

Texte rédigé par Pascale Hénaut (INRAE-DipSO).

Pour citer ce texte : Focus Agate : Mister Buckton et les pucerons anglais, Pascale Hénaut (INRAE-DipSO), mars 2023, https://agate.inrae.fr/agate/fr/content/focus

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