Flore des serres et des jardins d'Europe, l'art au service de l'horticulture
Pour accompagner le développement de son entreprise horticole, Louis Van Houtte édite des catalogues très classiques. Mais il est également connu pour la création d’une revue extraordinaire : la Flore des serres et des jardins d’Europe. Cette revue, dont le premier tome est édité, en français et en anglais, en 1845, est une aventure esthétique, botanique et humaine.
Un projet ambitieux
Louis Van Houtte, en collaboration avec d’autres horticulteurs et botanistes de renom s’attache à décrire, par des mots, mais aussi grâce à des illustrations en couleurs, des plantes exotiques ou locales, découvertes récemment ou plus anciennes.
[…] la flore est destinée à être avec le temps une véritable ENCYCLOPEDIE VEGETALE ; qu’elle doit donc reproduire de temps à autre les belles et bonnes plantes, qui, introduites depuis plus ou moins de temps dans les jardins, sont restées en possession de la faveur des amateurs, ou sont devenues rares dans les collection, ou en sont même tout-à-fait disparues, enfin qu’elle sera toujours en même temps, la première à décrire et à figurer toutes les nouveautés méritantes qui viendront à sa connaissance ; et que dans ce but elle ouvrira avec empressement ses colonnes, à toute personne qui posséderait une BONNE plante inédite. (Charles Lemaire, tome 3 p. 262)
En 1845, trois hommes se chargent de rédiger les articles de la revue, Charles Lemaire, Louis Van Houtte et Michael Scheidwieler. En 1876, année du décès de Louis Van Houtte, ce sont trente-trois hommes, belges, français, anglais et allemands qui collaborent à la rédaction de la flore.
Des illustrations grand luxe
Des milliers de lithographies, dont plus de deux mille mises en couleurs à la main et en pleine page, sont réalisées sur le site de l’exploitation horticole de monsieur Van Houtte. Les lithographes bénéficient d’un atelier sur place. La revue y est également imprimée et envoyée à des milliers d’abonnés.
« Un dessinateur, deux graveurs, sept pressiers, et cent-cinquante coloristes travaillent exclusivement à la partie lithographique et xylographique de la FLORE. Les visiteurs de l’Établissement Van Houtte sont admis à visiter ses ateliers. » (1851, note adressée aux abonnés de la revue qui a pris du retard)
Les principaux lithographes qui œuvrent pour la revue sont belges : F. Severeyns, L. Stroobant et P. de Pannemaker.
Georges Severeyns est lithographe de la société d’horticulture de Gand et fonde son propre atelier spécialisé en planches de botaniques en 1829. Il participe à l’illustration des Annales de Gand, la Flore des serres, la Belgique horticole, Illustration horticole et la Nouvelle Iconographie des Camellias.
Louis Constantin Stroobant (1814-1873) est un artiste peintre et lithographe belge qui a surtout œuvré les dix premières années de la revue.
Pieter de Pannemaker (1832-1904), descendant d’une famille de tapissiers néerlandais, a appris le métier de lithographe et peintre aquarelliste à Gentbrugge en travaillant pour la revue.
À partir de 1854, Charles Lemaire (co-rédacteur de la revue des serres et jardins d’Europe) édite le journal « l’Illustration horticole, journal spécial des serres et des jardin ». Il est illustré par les mêmes artistes que la Flore.
Des thématiques très variées
Une grande partie de la revue est consacrée aux fleurs cultivées sur le domaine horticole de Louis Van Houtte à partir de graines envoyées du monde entier. Ces plantes (et leurs graines) étaient pour la plupart proposées à la vente. Des catalogues thématiques étaient publiés régulièrement en parallèle de la Flore.
Quelques plantes exceptionnelles ont été décrites dans leur milieu naturel, avec des illustrations cherchant à rendre justice à la nature. C’est le cas de Victoria Regia, un nénuphar géant, pour lequel Van Houtte fit même construire une serre spéciale sur son domaine horticole.
Mais la Flore donne aussi de nombreux conseils de culture et ouvre ses colonnes aux horticulteurs professionnels ou amateurs. Elle reprend des articles parus dans les autres revues horticoles importantes du moment. Elle édite des comptes-rendus de voyages botaniques, de concours horticoles et donne aussi des conseils en cuisine et conservation des aliments ainsi que de décoration florale. Les plantes aquatiques ne sont pas oubliées avec un long article illustré sur les plantes d’aquarium marins en 1858.
Les articles sont parfois dispersés dans un tome, voire entre plusieurs tomes. La rédaction des articles est souvent lyrique et l’ensemble est accessible même aux non-initiés.
La flore des serres et des jardins d’Europe est devenue un objet de collection au fil des décennies. La bibliothèque de la Villa Thuret à INRAE a la chance d’en posséder une collection en très bon état, numérisée grâce à la BNF, afin de la rendre accessible au plus grand nombre.
Sources bibliographiques
Flore des serres et des jardins d’Europe, accès à la collection
L’illustration des revues d’horticulture en Belgique au XIXe siècle, Anne-marie Bogaert-Damin, In Monte Artium, 2014, vol 7. P 155-176.
Texte rédigé par Pascale Hénaut (INRAE - DipSO)
Pour citer ce texte : Focus Flore des serres et des jardins d’Europe : l'art au service de l’horticulture, Pascale Hénaut (INRAE), décembre 2024. https://agate.inrae.fr/agate/fr/content/focus
Illustrations
Le bandeau a été réalisé à partir de deux illustrations : Crocus Omer Pacha et Crocus Vernus, flore des serres et des jardins d’Europe, 1865
La vignette a été réalisée à partir d'une illustration : Gilia Dianthoides, flore des serres et des jardins d’Europe, 1856